ISSN 2271-1813

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Dictionnaire de la presse française pendant la Révolution 1789-1799

C O M M A N D E R

   

Dictionnaire des journaux 1600-1789, sous la direction de Jean Sgard, Paris, Universitas, 1991: notice 275

*COURRIER DE LA NOUVEAUTÉ (1758)

1Titres Le Courier de la Nouveauté. Feuille hebdomadaire à l'usage des Dames.

2Dates Prospectus daté de 1758, annonçant la parution du journal pour le 4 avril de la même année. Permission: 22 décembre 1757 (Prospectus «avec approbation et privilège du roi»).

Périodicité annoncée: hebdomadaire (les mardis). Périodicité réelle: aucune.

3Description Le Prospectus comporte 8 p., 120 x 180, in-8º. Chaque livraison aurait été du même format. Deux culs-de-lampe.

4Publication Paris, l'imprimerie de Grangé, rue de la Parcheminerie. Prix de la souscription: 12 # par an (Paris et province), payables à M. Cheuvry.

5Collaborateurs Marie-Claudine de SAINT-AUBIN (marquise du Crest), aidée (ou supplantée?) par Mercier de Menneville.

6Contenu Contenu annoncé: «tout ce qui concerne la toilette et l'ajustement des Dames»; en fait, de la publicité pour: 1) perruquiers et coiffeuses; 2) marchands de tissus, couturières et tailleurs; 3) bijoutiers; 4) jardiniers fleuristes, faiseurs de confitures et bonbons; 5) organisateurs de fêtes et divertissements; 6) «gens à talent pour l'instruction de la jeunesse». Tous les marchands et spécialistes concernés sont invités à faire insérer des articles, pourvu que ceux-ci soient signés.

Public visé: «les Dames se plaignant d'avoir été oubliées».

7Exemplaires B.N., Rés. 8º Lc14 1 et ms. f. fr. 22134, fº 142-154.

8Bibliographie B.H.C., p. 598; H.G.P., t. I, p. 165, 316. – Harmand J., Madame de Genlis, sa vie intime et politique, 1746-1830, Paris, 1912. – Grosclaude P., Malesherbes, témoin et interprète de son temps, Paris, Fischbacher, 1961, p. 70-71. – Sullerot E., Histoire de la presse féminine en France des origines à 1848, Paris, A. Colin, 1966, p. 11. – Kleinert A., Die frühen Modejournale in Frankreich, Studien zur Literatur der Mode von den Anfängen bis 1848, Berlin, Erich Schmidt, 1980, p. 57-59. – Van Dijk S., «Femmes et journaux au XVIIIe siècle», Australian journal of French studies, 1981, vol. XVIII, p. 171. – Rimbault C., La Presse féminine de langue française au XVIIIe siècle (thèse 3e cycle dact., EHESS), Paris, 1981. – Gaudriault R., La Gravure de mode féminine en France, Paris, 1983, p. 34. – Broglie G. de, Madame de Genlis, Paris, 1985. – Van Dijk S., Traces de femmes: présence féminine dans le journalisme français du XVIIIe siècle, Amsterdam et Maarssen, 1988, p. 184.

Historique S'il avait réussi à paraître, ce journal aurait été le premier journal de modes en France (honneur qui revient maintenant au Courier de la Mode ou Journal du goût (1768-770). Le Courier de la nouveauté avait le même objectif que le Cabinet des modes (1785-1786), qui a bien mieux réussi: promouvoir l'industrie de la mode. Le Prospectus du Courier de la nouveauté cependant, rédigé presque entièrement par une femme, insiste davantage sur l'existence d'un public féminin attendant avec impatience ce genre de journal.

L'idée provient selon toute vraisemblance de la nécessité de remédier à une situation financière catastrophique, qui avait été cause aussi de la séparation des époux du Crest: le marquis était resté dans sa terre de Saint-Aubin (achetée depuis peu de temps) dans le but de la revendre (ce qui fut fait le 15 octobre 1757); la marquise «préféra tout quitter, laissant peut-être croire qu'une existence plus brillante l'attendait à Paris». Avec sa fille (qui sera plus tard Mme de Genlis) elle habita d'abord chez une cousine, puis elles s'installèrent «dans un mesquin rez-de-chaussée donnant sur un jardin humide». Malgré sa pauvreté la marquise, prenant le nom de la terre qu'on venait de vendre, avait de nombreux contacts dans la société «où elle passait généralement pour une femme d'esprit» (Harmand, p. 32-45; voir aussi De Broglie, p. 23 et suiv.).

Ainsi c'est la duchesse de Bourbon que, pour se lancer dans le journalisme de la mode, elle fait intervenir en sa faveur auprès de Malesherbes, le 19 octobre 1757. La duchesse demande un privilège et joint à cette demande un mémoire signé «De St. Aubin», qui sera le Prospectus, et un placet que Malesherbes ne lit pas: il ne s'apercevra pas que le suppliant est une femme.

Dans la suite de la correspondance (conservée dans le fonds Anisson) et même dès le 24 octobre, Marie-Claudine de Saint-Aubin se fait représenter (ou supplanter?) par un certain Mercier de Menneville (habitant rue Saint-Louis au Marais) qu'on appelle son «associé». Celui-ci disparaît début décembre: il déménage sans laisser d'adresse, après avoir ajouté quelques détails au Prospectus initial, où il précise que c'est à lui qu'il faut payer les souscriptions, et qu'il signe de son seul nom à lui. Est-ce qu'il est un de ces personnages louches dont Mme de Saint-Aubin s'était déjà méfiée? Dans son placet elle avait exprimé ses craintes «qu'ayant fait les premieres avances d'autres ne profitassent de cette découverte et ne la privent par conséquent des avantages que ses soins auraient pû luy procurer».

Toujours est-il que sur le Prospectus imprimé le nom de Mercier de Menneville ne figure plus, ni celui de Mme de Saint-Aubin: c'est à Cheuvry (autre «associé»?) qu'il faudra payer les souscriptions et envoyer les articles. Mais au moment de la parution de ce Prospectus, l'affaire est-elle réglée? Sur le registre de la librairie figure une permission pour le Courier de la nouveauté, mais sans le nom de l'intéressé(e) (f. fr. 21998, fº 193); et un mémoire anonyme qui fait partie de la correspondance Malesherbes explique que c'est Courmont, propriétaire des Annonces, affiches et avis divers, fortement protégé par Malesherbes (Grosclaude), qui se serait opposé à cet enregistrement pour des raisons «trop frivoles pour etre icy raportez». Pour quelle raison que ce soit: intrigues de Courmont, habileté de Malesherbes, malice de Mercier de Menneville ou découragement de la marquise, le projet échoue. Mme de Saint-Aubin et la future Mme de Genlis résoudront d'une autre façon leurs problèmes d'argent: en s'installant chez le fermier général La Popelinière. La journaliste manquée va bientôt se lancer dans les romans (Les Dangers des liaisons, 1763; Mémoires en forme de lettres, 1765).

Suzanne VAN DIJK

 


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© Universitas 1991-2024, ISBN 978-2-84559-070-0 (édition électronique)